Etude ALIENOR, clap de fin : 1000 regards sur la santé oculaire
RetourLe 9 octobre 2025, à l’occasion de la Journée Mondiale de la Vue s’est tenue la cérémonie de clôture d’ALIENOR, l’étude épidémiologique de cohorte sur le vieillissement oculaire.
Après 18 années de collecte et d’analyse de données, c’est l’occasion de revenir sur les grandes avancées permises par l’étude et celles à venir

Photo de Laetitia HOUINOU : Sylvain Bouton , Laure Gayraud, Catherine Helmer, Marie Noelle Delyfer, Bénédicte Merle, Henri Chibret, Cécile Delcourt, Cedric Schweitzer, François SADRAN, Jean François Korobelnik
L’étude ALIENOR est une cohorte épidémiologique menée auprès de la population générale âgée de plus de 65 ans.
Les participants sont issus de la cohorte Trois-Cités (3C), qui regroupe près de 10 000 personnes réparties dans trois villes françaises : Bordeaux, Dijon et Montpellier.
À Bordeaux, 1 013 volontaires ont pris part au suivi ALIENOR. Tous ont pu bénéficier d’examens ophtalmologiques tous les 2 à 3 ans, pendant une période de 18 ans, avec des techniques novatrices permettant ainsi de récolter des données à analyser pour de nombreuses années.
Les maladies liées au vieillissement sont des maladies qui se développent au fil du temps. Afin d’étudier les différentes phases de survenue et de progression des maladies, le suivi doit lui aussi s’inscrire dans la durée. C’est en cela que les études de cohorte épidémiologique de ce type sont d’un grand bénéfice pour la recherche.

Photo de Laetitia HOUINOU : Cécile Delcourt, Jean François Korobelnik, Laure Gayraud, Bénédicte Merle
L’étude ALIENOR est née à la suite de l’étude POLA, menée à Sète, dans l’Hérault.
Cette précédente étude avait mis en évidence l’importance du mode de vie dans les maladies oculaires, comme le tabagisme, la nutrition ou l’exposition aux ultraviolets.
À son arrivée à Bordeaux, Cécile Delcourt a souhaité aller plus loin, avec comme objectif principal d’étudier le rôle de la nutrition dans la survenue des maladies oculaires, telles que la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), la cataracte ou le glaucome, sans oublier les nombreux autres facteurs génétiques, le mode de vie ou les expositions environnementales.
Un objectif largement atteint avec près de 66 articles scientifiques, 100 communications, 8 thèses de sciences, 13 thèses de médecine, une start-up fondée par un ancien doctorant, Soufiane Ajana, ainsi qu’une forte visibilité médiatique, avec des parutions et reportages sur France 2, France 3, France Inter, Le Monde, Le Figaro, France Culture ou encore The Washington Post.
Mais surtout de grandes avancées, comme notamment :
- Le rôle de l’alimentation méditerranéenne dans la progression de la DMLA, mis en évidence par Bénédicte Merle, avec une réduction de 40 % du risque de progression chez les personnes qui suivent une alimentation de ce type, c’est-à-dire riche en fruits et légumes, en céréales, huile d’olive et en poisson, avec une consommation modérée de viande et de produits laitiers. Bénédicte a également montré une association avec les concentrations sanguines de plusieurs nutriments, comme les acides gras oméga 3 à longue chaine, les caroténoïdes et certaines vitamines, avec la DMLA mais aussi avec le vieillissement du nerf optique.
- Catherine Helmer et Sara Lima Rebouças se sont intéressées aux relations entre le vieillissement oculaire et le vieillissement cérébral, et ont mis en évidence des associations entre les vaisseaux et les nerfs de la rétine avec une accélération du vieillissement cérébral.
- L’équipe ophtalmologique (Jean-François Korobelnik, Marie-Noëlle Delyfer et Cédric Schweitzer) a mis en évidence des biomarqueurs précoces.
Ainsi, Petra Larsen a publié en 2025 un article montrant un changement dans les couches de la rétine en amont de la DMLA. Ces mesures, réalisables grâce à une technique d’imagerie disponible en routine clinique, l’OCT, pourraient permettre d’identifier précocement les personnes les plus à risque de DMLA et de mieux comprendre les mécanismes de survenue de cette maladie.
- Enfin, Laure Gayraud a mis en évidence une accélération de la perte des fibres nerveuses de la rétine chez les personnes plus exposées à la pollution de l’air. Cette perte des fibres nerveuses est une caractéristique du glaucome, et ceci suggère donc une possible augmentation du risque de glaucome en relation avec la pollution de l’air.

Photo de Laetitia HOUINOU : Pierre Hurmic, maire de Bordeaux
Et maintenant ?
Si l’étude ALIENOR a pris fin sur le terrain en 2024, la recherche se poursuit. L’équipe dispose désormais d’une biobanque et d’une base de données d’une richesse exceptionnelle, qui continueront d’alimenter de nombreux projets.
Des collaborations sont déjà en cours au sein de grandes cohortes nationales comme Gazel, Constances et E3N-Générations, mais également dans les programmes SHIVA et VBHI, pour approfondir les relations entre la rétine et le cerveau.
Enfin, en 2026, une nouvelle étude verra le jour : la cohorte Clémence, dédiée à la santé oculaire des enfants. Face à une épidémie de myopie, qui touche déjà plus de 8 jeunes sur 10 dans les grandes villes asiatiques et près d’un jeune Européen sur deux, cette cohorte sera l’une des rares en Europe à explorer cette thématique.