Axes
Les travaux de l’équipe Healthy visent à mieux comprendre l’interaction entre les différents facteurs de risque pour les PSM au cours de la vie et à améliorer l’efficacité des interventions en promotion et prévention des PSM chez les enfants et les jeunes adultes. Les travaux des membres de l’équipe sont centrés autour de deux axes.
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Identifier les facteurs de risque et de protection pour les problèmes de santé mentale (PSM) au cours de la vie
Les travaux du premier axe visent à faire progresser les connaissances en épidémiologie du développement humain de la conception à l’âge adulte (approche ‘life span’). Nous étudions les facteurs de risque biologiques et sociaux pour les PSM adultes et comment ces facteurs interagissent au cours de la vie. Nous procédons à des analyses approfondies des facteurs de risque et évaluerons l’impact sur la réussite scolaire (au cours de l’enfance et de l’âge adulte, à l’Université) et éventuellement sur le devenir professionnel. Pour ce faire, les membres de l’équipe travaillent avec des données de cohortes en population générale. La cohorte i-Share (n≈20 000 étudiants) comprend des données rétrospectives et prospectives sociodémographiques, familiales, scolaires, de santé physique et mentale, mais aussi des données de type biomarqueurs au travers de mesures génétiques, de protéines de l’inflammation ainsi qu’une banque d’imagerie cérébrale unique. La cohorte a été financée dans le cadre de l’appel d’offres Investissement d’avenir et est une des cohortes principales utilisées par les membres de l’équipe.
Certains des membres de l’équipe mènent des travaux afin d’identifier les facteurs de risque et de protection devant être ciblés dans les programmes de prévention.8,14,22,30-35 Ces travaux reposent sur l’utilisation d’un ensemble d’études longitudinales Françaises (EDEN, ELFE, i-Share), britanniques (ALSPAC, BMCS) et Canadiennes (ELEMQ, ELEM, ELNEJ, ELDEQ, EJNQ) ayant un suivi régulier à partir de la naissance de familles avec de jeunes enfants. Dans la plupart de ces cohortes, les informations génomiques et en imagerie cérébrale s’ajoutent aux données individuelles, familiales scolaires et socio-professionnelles. Les bases de données sont des mégas donnés : elles comprennent des centaines de milliers de variables sur plusieurs milliers d’individus issus de la population générale.
L’équipe Healthy est particulièrement bien positionnée pour continuer à mobiliser pendant les prochaines années les ressources humaines et financières nécessaires à l’exploitation des cohortes à l’aide des méthodes d’analyses classiques et des nouvelles avancées en statistique et ce, pour deux raisons. Premièrement, certains membres de l’équipe possèdent une solide expertise d’analyses de ces bases de données qu’ils ont contribué à construire. Deuxièmement, l’ancrage de l’équipe au BPH est un élément clé puisqu’il permet de contribuer et de profiter de la création du très innovant programme d’École Universitaire de Recherche en Santé Publique Numérique (Directeur Rodolphe Thiébaut) financé dans le cadre du PIA3. Il est fondé sur la collaboration de partenaires à la fois académiques et industriels au niveau local et international.
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Etudes expérimentales pour la promotion de la santé mentale et de la réussite scolaire
Ce volet comporte des études qui testeront l’efficacité d’interventions à destination a) des enfants d’âges préscolaire ou scolaire et b) des étudiants universitaires.
Études chez les enfants.
Les études économiques indiquent que les investissements dans l’éducation préscolaire (e. g. les services de garde en crèche) pour les enfants de milieux défavorisés offrent un retour social sur l’investissement de l’ordre de 7-10% par année. Les économies sont réalisées grâce à l’augmentation du niveau académique, la réduction de l’incidence de maladies physiques et mentales et la réduction de la criminalité. Ces calculs de rentabilité sont fondés sur des essais randomisés soulignant l’importance d’agir dès la petite enfance afin de promouvoir le développement des compétences sociales, notamment des enfants issus de familles défavorisées. Toutefois, des études expérimentales démontrant l’efficacité de tels programmes n’ont pas été réalisées dans des sociétés avec des économies redistributives comme celle de la France, où des services de soins et d’éducation préscolaire sont déjà offerts sur une base universelle.
Avec la nouvelle équipe Healthy, nous évaluerons l’efficacité et la rentabilité de programmes de formation des professionnels qui travaillent auprès des enfants d’âges préscolaires. L’intervention en crèche visant l’amélioration des pratiques éducatives, notamment le soutien à la promotion des compétences sociales des enfants issus de milieux défavorisés. Le programme ‘Accompagne Moi’ sera déployé dans 60 crèches situées dans 4 régions de la France (Aquitaine, Hauts de France, Bassins miniers, région Parisienne). Il s’agit d’un essai randomisé en grappes ou les crèches seront assignées au hasard à un programme de soutien à la qualité des pratiques éducative vs à une condition contrôle. Cette étude, dont l’INSERM est le promoteur et l’épicentre est à Bordeaux, permettra de générer de nouvelles connaissances sur l’efficacité de différentes modalités éducatives pour les jeunes enfants ainsi que sur les mécanismes d’action et les modificateurs d’effets. Les connaissances générées par l’étude sont cruciales pour optimiser l’utilisation des ressources visant à promouvoir la santé et le bien-être et de réduire les inégalités sociales en éducation et en santé dès la petite enfance.
Le même essai est réalisé parallèlement à Montréal par la directrice de l’équipe, en collaboration avec EUCLID et la plateforme d’étude clinique du CHU Ste Justine (Université de Montréal). Les équipes de recherche autant que les équipes d’intervention de Bordeaux et Montréal co-développent les procédures d’évaluation, le contenu et l’implantation de l’intervention. Les essais sont financés par des fondations philanthropiques (France) et par les Instituts de Recherche en Santé du Canada et débuteront à l’automne 2019.
Études chez les étudiants universitaires.
Une fois leurs études terminées, les jeunes passent la majeure partie de leur temps au travail. Le monde du travail s’est considérablement transformé au cours des vingt dernières années. Les «travailleurs du savoir » – une catégorie qui englobe tant les travailleurs des centres d’appels que les ingénieurs, les enseignants ou les employés du secteur des finances – contribuent d’une manière de plus en plus décisive à la réussite économique des pays développés (OCDE, 2007). La capacité des individus à tirer parti des avantages de cette nouvelle économie de la connaissance dépend largement de la santé, de l’éducation, des compétences, et des aptitudes individuelles (« skills »), c’est-à-dire de la qualité du capital humain. Ce constat nous amène à accorder une importance considérable à son développement, son maintien et son amélioration tout au cours de la vie. L’éducation précoce, l’éducation soutenue, le renforcement des capacités de résilience des individus, notamment les plus vulnérables, représentent des sources de croissance économique dont la mission n’a jamais été aussi stratégique. A cet effet, l’équipe Healthy vise à concevoir, mettre en œuvre et valider une stratégie innovante basée sur une approche de e-santé pour renforcer les capacités des étudiants en matière de santé mentale. Cette intervention, réalisée via une application Web sur le bien-être psychologique, visant à améliorer la littératie en santé mentale et à surmonter la stigmatisation, fournira une ressource d’auto-évaluation et suggérera des ressources de soutien disponibles localement. Le programme bénéficiera de notre succès dans le recrutement de la cohorte i-Share et sera niché à l’intérieur de celle-ci. Dans l’ensemble, ce projet représente une étape majeure dans la compréhension et la gestion des PSM chez les étudiants.
Plan de développement d’interventions en promotion de la santé utilisant l’intelligence artificielle.
Les essais randomisés de l’axe 2 profiteront des avancées technologiques en Intelligence Artificielle (IA) afin de développer des outils d’intervention pour améliorer les compétences et les habiletés des professionnels de la petite enfance et des étudiants universitaires. Sur le modèle des programmes de coach personnalisé en santé (p. ex. LARK; https://www.web.lark.com), nous développeront des interventions adaptées aux profils et aux besoins variés des individus. L’intervention vise à favoriser l’autonomisation (« empowerment ») des professionnels et des étudiants. Ces impacts potentiels d’autonomisation de l’IA sont particulièrement prometteurs dans une perspective de prévention des problèmes et des inégalités en santé mentale. Nous mettrons en place des recueils de données en continu dans les expérimentations en nous appuyant sur l’utilisation de l’IA auprès des individus aux prises avec un problème de santé mentale ou de troubles des apprentissages.28,29 Nous recueillerons du matériel biologique afin de mieux comprendre en quoi la réduction de l’exposition à différents facteurs de stress (p. ex. agressions en garderie, examens et concours à l’Université) peuvent influencer les mécanismes biologiques (notamment du stress et de la neuro-inflammation) et sociaux.